“Pour Dom Guéranger servir la liturgie, c’est servir l’Église”

Un siècle et demi après sa disparition, Dom Guéranger reste l’une des grandes voix de la liturgie. Moine de l’abbaye de Solesmes, Dom Guilmard explique à Aleteia pourquoi son enseignement demeure vivant et comment il peut encore guider la prière des chrétiens aujourd’hui.
Les Journées diocésaines de la jeunesse de Saint-Denis coïncident cette année avec le 150e anniversaire de la mort de Dom Guéranger, restaurateur de la vie bénédictine en France et dont le procès de béatification est en cours. Une occasion à ne pas manquer pour le diocèse qui a décidé d’organiser, pour l’occasion, un week-end spécial les 22 et 23 novembre à la basilique-cathédrale de Saint-Denis afin de faire découvrir son enseignement et son charisme. Dom Guilmard, moine de Solesmes, détaille pour Aleteia en quoi l’œuvre de Dom Guéranger continue d’inspirer et d’éclairer la prière de l’Église.
Aleteia : Qui était Dom Guéranger, en quelques mots, pour ceux qui le connaissent mal ?
Dom Guilmard : Dom Guéranger, né en 1805 et mort en 1875, est la figure qui a restauré la vie bénédictine masculine en France après la Révolution, qui avait dispersé les moines. C’était un homme profondément attaché à l’Église, ayant consacré sa vie à la servir sous diverses formes. D’abord, il s’est appliqué à rassembler tout ce que l’on savait sur la place du pape dans l’Église. […] Puis, assez vite, il s’est engagé dans un vaste travail liturgique pour encourager l’adoption du rite romain dans toutes les églises de France, car beaucoup de diocèses, lorsqu’il est devenu prêtre vers 1827, suivaient encore des liturgies parfois éloignées de celle du Saint-Siège. En 1833, à 28 ans, il entre dans la vie monastique bénédictine (NDLR : et refonde l’abbaye de Solesmes) et c’est sur cette base monastique qu’il accomplira ensuite toute son œuvre.
Ce qui a toujours guidé Dom Guéranger, c’est son amour de l’Église !
Quel est, à vos yeux, l’apport essentiel de Dom Guéranger à l’Église ?
Ce qui a toujours guidé Dom Guéranger, c’est son amour de l’Église ! À travers cela, il a servi le Saint-Siège, le Pape, et la liturgie, car la liturgie est la prière de l’Église. En servant la liturgie, Dom Guéranger sert donc l’Église qui prie... Ainsi l’un de ses plus grands travaux est bien sûr l’année liturgique. Un travail titanesque qu’il entreprit volume par volume, 15 au total. C’était pour permettre aux prêtres et aux laïcs de suivre la liturgie quotidienne tout au long de l’année, dans le cycle liturgique, y compris les Laudes, les Vêpres et la messe bien sûr. Il est ainsi le précurseur de tous les livres que nous connaissons aujourd’hui, comme Magnificat, Prions en Église, ainsi que des missels et guides liturgiques. [...] Mais Dom Guéranger a également beaucoup œuvré pour la fête du Sacré-Cœur, afin qu’elle soit célébrée dans le monde entier.
En quoi son œuvre reste pertinente au XXIe siècle ?
Dom Guéranger place avant tout la prière de l’Église. L’Église est notre mère, et comme elle prie, nous sommes appelés à prier avec elle. Le pape François a souvent rappelé qu’on apprend à prier sur les genoux de sa mère… et, d’une autre manière, nous apprenons à prier avec l’Église, notre Mère. C’est un point central et toujours très actuel. Depuis le Concile, on a beaucoup insisté sur la participation active, notamment à la messe. Certes, il faut participer, mais la perspective de Dom Guéranger est encore plus vaste : il nous invite à prier avec l’Église, notre Mère, l’Église du monde entier. [...] C’est une perspective beaucoup plus universelle et plus décentrée de soi-même.
Comment au quotidien pourrait-on suivre les enseignements de Dom Guéranger ?
Il y a plein de moyens ! On peut notamment réciter, en privé ou en groupe, par exemple avec des amis, les Vêpres ou les Complies. C’est une belle démarche que l’on peut pratiquer seul, en couple ou en famille. Pendant la pandémie de Covid, certains groupes chantaient les Vêpres ensemble à distance. Des personnes qui se connaissaient peu, voire pas du tout, récitaient régulièrement les Vêpres ou les Laudes. C’est un bel exemple pour marcher dans les pas de Dom Guéranger. Cette pratique de faire Église ensemble est très actuelle des initiatives existent déjà et on peut encore les élargir.
Laure-Anne Marxuach - Aleteia